A la une de rbnews international cette semaine:
- La répression du mouvement populaire contre le développement de mines d’or à Skouries en Chalcidique continue avec des violations de droits essentiels par les autorités.
- Selon un document confidentiel qui a vu le jour cette semaine, l’Etat transfère des toxicomanes dans des centres de détention pour immigrés afin de les enregistrer.
- Le député de l’Aube Dorée Ilias Kasidiaris a été acquitté, alors que le procureur prend des mesures contre un candidat du parti néonazi à la suite de déclarations scandaleuses faites par ce dernier au sujet des immigrés.
- Le gouvernement cherche à faire ratifier par le parlement le plan « Athéna » de réforme de l’enseignement supérieur, mais doit faire face aux réactions des universitaires ainsi qu’à des tensions au sein de sa propre coalition.
1. Skouries
La situation des droits de l’homme dans le nord-est de la Chalcidique, une région du nord de la Grèce qui vit de fortes tensions entre, d’une part, le gouvernement et la compagnie minière Hellas Gold, autrement dit Or Grec, et d’autre part les habitants qui sont opposés au développement du projet minier, s’est encore dégradée cette semaine. La police a continué à procéder à des détentions arbitraires et à convoquer des habitants à la direction régionale de la police à Polygyros pour déposition, soi-disant dans le cadre de l’enquête au sujet de l’incendie criminel au chantier de la mine dans la forêt de Skouries le 17 février. Il y a eu plus de 100 détentions à ce jour. Tous les détenus ont été libérés sans être inculpés.
Les habitants accusent la police de chercher à les intimider, en procédant à des détentions de plusieurs heures sans inculpation, en refusant l’accès aux avocats, et en forçant les détenus à fournir des échantillons d’ADN sous pression psychologique mais aussi physique. Par exemple, un lycéen de 18 ans a raconté qu’il avait été obligé de fournir un échantillon d’ADN sous la menace d’une détention prolongée et avec l’insinuation qu’il serait battu s’il refusait. Dans la loi grecque, la police n’a pas le droit d’exiger un échantillon d’ADN de la part de détenus qui n’ont pas été inculpés.
Le cas le plus choquant cette semaine a sans doute été celui d’une lycéenne de 15 ans du village de Ierissos, qui a été convoquée par un coup de fil au lycée pour aller déposer à Polygyros, sans que ses parents en soient informés. Après une tempête de protestations dans le village et une plainte formelle de son père auprès des autorités, la police a nié l’avoir jamais convoquée, pour, le lendemain, lui envoyer une convocation écrite à son domicile.
Le matin du jeudi 7 mars, une force importante de la police anti-émeute, accompagnée d’agents de la Sûreté nationale et de l’unité anti-terroriste, est arrivée à Ierissos pour y fouiller des maisons. Les habitants ont établi des barricades pour les empêcher d’entrer dans le village et la police a répondu par de généreuses quantités de gaz lacrymogène, dont une partie est tombée dans la cour de récréation de l’école secondaire, où un élève a été blessé. La police prétend n’avoir utilisé qu’une quantité limitée de lacrymogène, nie en avoir jeté dans l’école, soutient que les problèmes respiratoires des habitants sont dus à la fumée des barricades et affirme qu’aucune détention ou arrestation n’a eu lieu, en dépit de nombreux témoignages et de photos et vidéos qui prouvent le contraire. La situation s’est quelque peu calmée vers le milieu de la journée et des policiers en armes ont mené des fouilles dans les maisons des détenus. La police a lancé un nouvel assaut contre les habitants et les journalistes qui les suivaient au cours des fouilles dans l’après-midi ; certains témoins rapportent qu’ils ont même jeté des lacrymogènes à l’intérieur de maisons. Deux enfants, âgés de cinq ans et dix mois, ont été hospitalisés pour problèmes respiratoires.
Une manifestation spontanée a eu lieu à Thessalinique dans l’après-midi du 7 mars en solidarité avec les habitants de Ierissos. Une autre manifestation anti-mine avait eu lieu Lundi à Alexandroupoli en Thrace, une autre région menacée par un projet minier. Les comités populaires de Chalcidique, de Thrace et de Kilkis organisent également une manifestation commune le samedi 9 mars à Thessalonique.
Entre-temps, une manifestation en faveur de la mine d’or a eu lieu samedi dernier dans le village de Megali Panagia en réponse à la grande manifestation anti-mine qui avait eu lieu au même endroit le 24 février. Les manifestants étaient principalement des employés de la compagnie Or grec et de sa société mère, AKTOR. Des habitants de la région, y compris de villages hors de la zone minière tels que Stavros, rapportent avoir reçu des coups de fil de la compagnie et du syndicat des mineurs pour les pousser à venir à la manifestation au cours de la semaine. Il est amusant de noter qu’au moins deux sites web ont utilisé des photos de la manifestation anti-mine du 24 février pour illustrer leur reportage sur la manifestation en faveur de la mine.
Les habitants de Chalcidique qui sont opposés au projet minier affirment qu’il aura des conséquences incalculables sur l’environnement, qu’il épuisera et polluera les réserves d’eau fraîche de la région et qu’à terme il détruira bien plus d’emplois dans les secteurs de l’agriculture, de l’élevage, de l’industrie alimentaire et du tourisme qu’il n’en créera dans le secteur minier. Ces affirmations reposent sur des études menées par diverses institutions scientifiques indépendantes, parmi lesquelles le Conseil environnemental et la faculté d’agronomie de l’Université de Thessalonique ainsi que le département de Macédoine de la Chambre technique de Grèce.
2. Opération Thétis : ratissage des toxicomanes et transfert à Amygdaleza
Le Journal des Rédacteurs a publié cette semaine un document « confidentiel » émis par le Centre national d’opérations de santé, qui décrit l’opération « Thétis ». Selon le reportage, la police a conçu cette opération en collaboration avec le Centre des opérations de santé pour la mettre en œuvre mercredi soir. Cette opération sans précédent vise à rassembler les toxicomanes du centre d’Athènes sans leur consentement, le but étant de les transférer au centre de détention pour immigrés sans papiers à Amygdaleza afin de les soumettre à des examens médicaux et d’enregistrer leurs données personnelles et médicales. Le personnel qui participe à cette opération comprend, au-delà de la police et du Centre des opérations de santé, des employés du Centre national pour la prévention et le contrôle des maladies et du ministère de la santé.
Quatre organisations de réhabilitation ont aussitôt répondu à ce programme avec un communiqué de presse, disant : « Au moment où la crise aggrave de jour en jour la situation des consommateurs de drogues et pousse davantage de gens vers la consommation et la marginalisation, on s’attendrait à ce que l’Etat prenne des mesures de prévention, d’intervention précoce, de traitement et de réintégration. Au contraire, ce type de politique punitive, qui stigmatise, met au pilori et pousse vers une marginalisation encore plus grande n’a pas sa place dans un Etat de droit ; elle creuse davantage les fissures au sein de la société grecque et accroît ses problèmes. » La Fédération des associations de médecins des hôpitaux grecs a également exprimé son opposition à l’opération Thétis.
3. L’Aube Dorée
Le procès du député de l’Aube Dorée Ilias Kasidiaris a finalement eu lieu jeudi à la cour d’appel d’Athènes, après la levée de son immunité parlementaire et de nombreux reports du procès. Kasidiaris était accusé d’avoir participé à une agression contre un étudiant dans la cité universitaire de Zografou en 2007. L’acte d’accusation spécifiait que Kasidiaris avait aidé les inconnus qui avaient matraqué et poignardé un étudiant dont ils ont volé la carte d’identité. Le nom de Kasidiaris s’était trouvé mêlé à l’affaire à la suite de la déposition d’un témoin qui avait dit aux autorités que les agresseurs avaient fui dans un véhicule dont il avait noté le numéro d’immatriculation et qui appartenait à celui qui allait devenir cinq ans plus tard membre du parlement de l’Aube Dorée.
Le procès s’est déroulé dans une atmosphère hostile, dans la mesure où la salle du tribunal s’est remplie dès le matin de partisans de l’Aube Dorée qui cherchaient à terroriser les avocats et les témoins. Selon les gens présents dans la salle, le principal témoin a reçu des menaces après avoir complété sa déposition. De plus, il y a eu des plaintes que la police contrôlait quiconque cherchait à entrer dans la salle sans être membre de l’Aube Dorée. Pendant ce temps, une manifestation antifasciste se déroulait à l’extérieur du tribunal.
La cour a acquitté le député néonazi, citant des doutes au sujet des témoignages. En sortant du tribunal, Ilias Kasidiaris a menacé les journalistes qui se trouvaient là : « Jusqu’à présent, vos chaînes poubelle disaient que je suis un brigand, un assassin et un criminel. Prenez-vous cette décision en pleine figure maintenant. Nous sommes tout-puissants et bientôt nous serons au pouvoir. »
Entre-temps, les déclarations du candidat de l’Aube Dorée Andreas Plomaritis dans un reportage de la chaîne britannique Channel 4 ont provoqué une levée de boucliers mais aussi une intervention judiciaire. Le reportage montre Plomaritis dire, au sujet des immigrés : « Nous sommes prêts à rouvrir les fours crématoires. Ils sont primaires. Ils sont des miasmes. De sous-hommes. Leur existence ne nous intéresse absolument pas. » Il continue en ajoutant que les immigrés doivent être transformés « en savon, mais pas du savon pour se laver, du savon pour laver les voitures et les trottoirs, parce qu’ils sont chimiques et pourraient nous donner des boutons. »
4. Le projet Athéna et les réactions qu’il suscite.
De nombreuses manifestations ont eu lieu cette semaine dans toute la Grèce au sujet de l’éducation, pour protester contre la mort de deux étudiant à Larissa la semaine dernière mais aussi contre des réductions budgétaires et le projet de réforme de l’enseignement supérieur proposé par le gouvernement. Les deux étudiants à Larissa sont morts d’asphyxie après avoir apporté à l’intérieur de leur domicile un barbecue à charbon pour se chauffer en raison de l’augmentation des taxes sur le fuel de chauffage, qui le rend inabordable. Des banderoles disant « ils nous tuent » ont été brandies dans toutes les manifestations qui ont eu lieu au cours de la semaine.
Un autre problème auquel font face les universités est le plan Athéna de réforme de l’enseignement supérieur. Le gouvernement affirme que le plan Athéna vise à améliorer l’enseignement supérieur en rationalisant l’allocation des ressources, autrement dit en fusionnant des départements, des facultés et même des universités ou des écoles supérieures techniques tout entières. Le milieu de l’enseignement supérieur dans son ensemble reproche aux autorités d’avoir planifié les fusions sur la base de rapports de népotisme politique et non pas de critères universitaires, et affirme que le projet aura pour résultat de déplacer des dizaines de milliers d’étudiants vers d’autres universités alors que les familles ne peuvent subvenir à ce coût au milieu d’une grave crise économique. La discussion du projet de loi Athéna au parlement cette semaine a également mis en valeur des tensions au sein du gouvernement, car les deux partis mineurs de la coalition gouvernementale, PASOK et Gauche démocratique, ont joint leur voix à celle de l’opposition pour exprimer des doutes et des objections au projet de réforme. De nouvelles manifestations étudiantes sont prévues dans les jours à venir.
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